Entretien avec Janis Otsiemi auteur gabonais dont la spécialité est le Polar
(Photo Samuel Kirszenbaum)
Janis Osiemi Bonjour. Nos lecteurs ont soif de mieux te connaître
Il est difficile de parler de soi sans en rajouter. Je m’appelle Janis Otsiémi. J’ai 40 ans. J’écris des polars dont les intrigues se déroulent essentiellement à Libreville, capitale du Gabon, où je réside. Outre l’écriture des romans, je travaille dans une société d’aviation d’affaires.
Après avoir remporté le Prix littéraire du Roman gabonais en 2000, tu continues à briller par tes publications. Peux-tu nous en faire l’éventail jusqu’à ce jour ?
En 2000, j’ai reçu le Prix du Premier roman francophone pour les un roman qui est aux antipodes des romans policiers que j’écris aujourd’hui. C’est un roman qui tourne autour du thème de l’altérité, c’est-à-dire la relation entre soi et autrui.
Tu es une des voix les plus avisées du polar africain actuellement. Qu’est-ce qui t’a lancé sur la piste de ce nouveau genre littéraire ? Et quel est l’état de la situation du polar dans notre continent ?
Quand j’ai publié je l’ai fait lire à mes amis. Ils ne semblaient pas très enthousiastes à l’idée que je ne puisse pas parler de leurs problèmes au quotidien pour un jeune homme comme eux qui vit dans l’un des plus gros bidonvilles de Libreville. C’est comme çaque je suis venu un peu par effraction au polar.Depuis 2007, j’en ai écrit pas moins d’une demi-douzaine parmi lesquels « et le dernier », tous aux Editions Jigal de Marseille. Mes polars trouvent au Gabon et surtout en Europe un accueil très chaleureux. Certes, le polar africain est un genre qui peine encore à prendre son essor parce que peu d’auteurs africains en écrivent. Mais il faut bien avouer qu’il existe en Afrique un lectorat pour ce genre de littérature, en juger par l’accueil que mes livres reçoivent. Au fait important, l’Afrique n’a rien à envier à l’Europe ou à l’Amérique, car la vie sur le continent noir avec ses fléaux tels que la corruption, le népotisme, la pauvreté, les guerres, etc… est un vrai terreau d’inspiration pour un auteur de polar comme moi.
Dans tes livres, tu dénonces avec virulence le régime de Bongo fils (Ali Bongo Ondimba) comme tu le faisais du vivant de Bongo père (Omar Bongo Ondimba). Que leur reproches-tu et quel est ton rêve pour le Gabon, ce pays que tu aimes tant et partant pour l’Afrique ?
La littérature policière est souvent considérée comme de la littérature de divertissement. Il n’en est rien, croyez-moi. Cette littérature a une vision sociale de la société. Ce qui me permet d’ausculter la société gabonaise dans tous ses travers. Je n’ai rien particulière contre les Bongo, père ou fils. Leur gestion du Gabon n’a pas été un exemple. Et j’en ai fais des personnages parce qu’ils portent en eux les tares de cette société gabonaise qui a été pourrie par l’argent. Bien que j’en dresse un tableau sombre, le Gabon est un pays qui a un potentiel énorme. Mon seul absolu est que les richesses de ce pays magnifique profitent à tous !
Quelle est la situation actuelle de la littérature gabonaise ?
La littérature gabonaise est en plein essor. Elle semble avoir pris son envol depuis les années 2000 avec une nouvelle génération d’auteurs et une forte présence d’auteures, il faut l’avouer. Elle occupe aujourd’hui la place qui est la sienne bien qu’elle doive faire face à plusieurs difficultés tels que le manque de vision culturelle définie par l’Etat.
En avril prochain, dans le cadre du festival Quais du Polar, Tu es invité à faire la rencontre des détenus dans un centre pénitencier de la région lyonnaise. Peux-tu nous en dire un peu plus ?
Je suis régulièrement invité en Europe pour faire connaître mes polars. Cette année, au mois d’avril, je suis un invité au Festival Quai du polar. C’est l’un des plus gros festivals en France dédié au polar. J’aurais la chance d’y rencontrer des auteurs que j’ai l’habitude de lire. Et c’est très important pour un jeune auteur comme moi. Quand il m’a été proposé de faire une rencontre avec des détenus dans un centre pénitencier, je n’ai pas hésité. Car dans mes romans, je parle beaucoup d’ex-taulards qui veulent retrouver leur place dans la société après plusieurs années au mitard. Et je pense que cette rencontre sera très enrichissante pour moi.
Ton mot de fin.
Etre écrivain était un rêve de jeunesse pour moi. Quand j’ai décidé d’en devenir, je n’avais pas les capacités, je n’ai pas fais des études universitaires. J’ai dû me construire en lisant des écrivains que j’aimais. Je suis fait des écrivains que j’ai lus. Dans la vie, quand on a la volonté, peu importe les obstacles devant soi, on peut arriver à réaliser son rêve. J’ai réalisé le mien.
Entretien réalisé par emile Arsele NGUETCHEU